L’exception culturelle tunisienne existe. Tekiano l’a rencontrée. Chez un vendeur (local) de DVD pirates (étrangers). Petite analyse d’un phénomène envahissant…
L’exception culturelle tunisienne existe. Tekiano l’a rencontrée. Chez un vendeur (local) de DVD pirates (étrangers). Petite analyse d’un phénomène envahissant.
Les boutiques vendant des DVD pirates et autres logiciels se sont développées de manière exponentielle en Tunisie. Une tendance alimentée notamment par la baisse du prix du lecteur de DVD. Pour à peine une cinquantaine de dinars les Tunisiens peuvent acquérir l’appareil, et se régaler en films d’ici… ou d’ailleurs. Le secteur du piratage, (même si l’expression peut paraitre, disons, incongrue), est florissant. De nombreux jeunes diplômés y ont trouvé un moyen intéressant de gagner leur vie, en téléchargeant via les réseaux peers to peers les dernières films et séries télévisées à succès, pour les écouler auprès d’un public de plus en plus exigeant. Un business devenu somme toute banal, puisque ce genre boutiques ont pignon sur rue. Une galerie (la 7 en l’occurrence) s’est même spécialisée dans ce créneau juteux, totalement banalisé. Encore faut-il respecter certaines règles…
Piratez mais pas tunisien
Dans ces différentes boutiques, opérant souvent sous une licence officielle de maintenance et réparation de matériel informatique, on a vu depuis plus d’un an disparaître toutes les œuvres tunisiennes. Mais pourquoi donc ? La réponse des professionnels est aussi simple que paradoxale : « c’est interdit ». D’autant plus qu’il y a toujours eus des copies pirates d’œuvres tunisiennes. De « Halfaouine » à « Makki et Zakeya », à l’époque en K7, jusqu’à certains films comme « le silence des palais » en DVD, on a toujours pu se procurer les œuvres locales en version pirates. C’est la sortie du film « VHS Kahlousha » en 2007 qui a changé la donne. Les producteurs du film ayant fait un énorme boucan sur le piratage, à travers une campagne de communication radio, web et une conférence de presse dédiée au thème, il semblerait que « l’on » ait été sensibilisé à la problématique de la propriété intellectuelle…tuniso-tunisienne. Autrement dit, vous pouvez écoulez tant que vous voudrez des films, séries, logiciels, albums de musique… Tant qu’on se limite strictement aux œuvres étrangères. Et après tout, charité bien ordonnée commence par soi-même. Il s’agit donc d’une forme « d’exception culturelle » sans doute unique au monde …
Soutenir le cinéma tunisien ?
En interdisant aux vendeurs de DVD d’écouler des œuvres tunisiennes, on a d’abord pensé à protéger le cinéma tunisien. En obligeant les gens à revenir aux salles obscures pour pouvoir les voir. Sauf que le mal qui freine le développement du cinéma tunisien n’est pas nécessairement le piratage. Ismael Nopasaran, auteur du livre « Cinéma en Tunisie », tient à le souligner. Il a ainsi noté que le piratage en masse des K7 vidéos des films tunisiens entre la fin des années 80 et le début des années 90, n’a pas perturbé, à l’époque, notre cinéma. Mieux : il s’agit même, sans doute, de l’une des périodes les plus brillantes de notre septième art. Les raisons de la morosité actuelle sont donc à chercher ailleurs. Mais alors ? Faut-il pour autant… pirater ??! Une chose est sûre le double langage ne favorise pas nécessairement la sensibilisation des Tunisiens aux notions de droit d’auteur et de propriété intellectuelle. Surtout qu’elles sont déjà sérieusement malmenées par le graveur DVD.
Mehdi Lamloum