La Tunisie «ne recèle pas de savants ou décrivains célèbres». «Les principales professions exercées dans deux régions sont lagriculture et lélevage dânes, de chameaux et de mules». Dixit, la version égyptienne de Wikipedia.
«Je ne vois vraiment pas pourquoi wikipedia existe en égyptien. Jai toujours trouvé ça à la limite du ridicule. L’égyptien est un dialecte et pas une langue» lance un facebookeur sur la page dun groupe appelant à ce que Wikipédia supprime la page de la Tunisie en dialecte égyptien. Lencyclopédie libre et multilingue Wikipedia existe aujourdhui en 267 versions pour autant de langues
Egyptien y compris! Il se trouve que cette encyclopédie manque de précision vu que ce quon qualifie d «égyptien» est juste un des dialectes de la langue arabe et pas une langue à part entière. Ecrite par des internautes, la crédibilité de Wikipedia a toujours été remise en question.
Et le comble a été atteint par la qualité des informations livrées dans la Wikipedia égyptienne. Surtout quand il sagit de la dévalorisation dun autre pays à travers la page qui lui est réservée sur la cet avatar pharaonique de lencyclopédie en ligne. Et en loccurrence, cest la Tunisie qui est visée, non pas en en antiques hiéroglyphes mais en égyptien. Un arabe dialectal que les Tunisiens connaissent bien, abondante production audiovisuelle nilotique oblige. Des internautes tunisiens se sont du reste mobilisés sur Facebook pour la suppression de la page Tunisie en «égyptien».
« Mes frères et surs : il faut réagir !! Invitez vos amis. C’est grave
» commente un tunisien sur la page Facebook des protestataires. Le hic avec la page «Tunisie» dans la Wikipedia égyptienne est quelle est pleine dinformations erronées basées sur des références qui ne sont pas dactualité. Parmi les erreurs enregistrées dans cette page Tunisie, citons «Carthageh», comme nom de lempire de Carthage ainsi que lappellation «Mouhafadha» pour les gouvernorats, appelés Wilaya en arabe. Cette page erronée affiche même des éléments absurdes du style «la Tunisie est répartie en 4 régions naturelles». Il y est même noté que «les principales professions exercées par les populations de 2 de ces régions sont lagriculture et lélevage de chèvres, dânes, de chameaux et de mules». Tant de fausses informations dont les causes sont plus perceptibles quand on se rend compte que cette page a été rédigée selon des références anglo-saxonnes datant du début des années 70. La première référence est en langue arabe : lencyclopédie culturelle de létablissement Franklin pour limpression et lédition sortie en 1972 au Caire et à New York. La deuxième référence, est certes plus sérieuse puisquil sagit de «The New Encyclopædia Britannica, Micropædia». Mais les volumes qui servent ici de sources datent de 1973-1974. Cherchez lerreur.
Les fausses informations et les références périmée ne sont pas les seules lacunes de la page Tunisie dans la Wikipedia égyptienne. Les partis pris à caractère dévalorisant ne manquent pas. Le fait que la Tunisie est «un très petit pays» a été mentionné plusieurs fois dans cette page. Le rédacteur a ainsi noté que larmée tunisienne est lune des «plus petites armées dAfrique». Il ira même jusquà relever que la Tunisie «souffre de faiblesse culturelle et ne recèle pas jusquà lheure actuelle, de savants ou décrivains célèbres». En réaction, les propos de certains internautes tunisiens en colère virent même aux insultes anti-égyptiennes sur la page Facebook «pour la suppression de la page Tunisie dans la Wikipedia égyptienne».
L’AFP a interdit à ses journalistes d’utiliser Wikipedia et Facebook comme sources d’informations. Controversée à cause de son système de rédaction ouvert au public, Wikipedia vient de donner du grain à moudre à ses détracteurs. La «liberté» que cette encyclopédie sarroge, lui a autorisé à considérer larabe dialectal dEgypte comme une langue à part entière ! A quand, une page Wikipedia en langue Seyes Khouk ?
Thameur Mekki
MAJ : Quelques heures suite à la publication de cet article, la page Tunisie dans la version égyptienne de Wikipedia a été rectifiée. Notre article ainsi que la mobilisation des facebookeurs tunisiens ont porté leurs fruits.
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