«El Moussameh Karim» est lynché par les internautes. La polémique nen finit pas de grossir. A court de créativité, on recycle. Mais si la démarche est écologique quand il sagit de déchets industriels, la télé poubelle, elle, na pas fini de polluer notre paysage médiatique.
Lémission El Moussameh Karim, diffusée tous les vendredis à partir de 20h30 sur Hannibal TV, est actuellement au centre dune controverse en Tunisie. Elle est ainsi le sujet darticles de journaux acérés, de posts ironiques sur les blogs. Même les sketchs radiodiffusés y trouvent matière à inspiration.
Alimentée par le sarcasme d’une page fan sur facebook, la polémique grossit de jour en jour. Lémission est descendue en flamme à coup de souris par les commentaires satiriques des internautes. Aucune production télé na suscité autant de brouhaha sur les pages du web.
Pic daudience
Plus de 58 000 fans partagent et expriment leur admiration pour «les plus fortes questions d’Abderrazek Chebbi», lanimateur de lémission. Paru dimanche 07 mars dans le supplément «magazine» du journal quotidien tunisien La Presse, un article évoquant cette page fan a encore une fois remis la polémique sous les feux de la rampe. «El Moussamah Karim est pourtant actuellement lémission la plus regardée du paysage audiovisuel tunisien avec 43,5% daudience» mentionne larticle de la rubrique «Rétrovision».
Mais le succès dEl Moussameh Karim à laudimat na rien dun scoop. Massivement critiquée en ce premier trimestre de 2010, lémission a déjà cartonné en 2009. Durant lannée précédente, «El Moussameh Karim» a même été lémission la plus regardée sur Hannibal TV avec 3 370 000 spectateurs. Cest en tous cas ce que rapportent les statistiques de Sigma Conseil. Il semble que les plumes des journalistes et des bloggeurs, dune part, et lironie des facebookeurs et autres sketchs de Seyes Khouk, dune autre, ne pèsent pas lourd face à lengouement des Tunisiens. Ce qui hérisse des dizaines de milliers de facebookeurs tunisiens, semble ravir leurs concitoyens téléspectateurs.
Réaction de la Dream Team dHannibal TV
Hannibal TV a lair den être consciente. Et la première télé privée de Tunisie na pas pu sempêcher de laisser ses proches se mobiliser pour marquer le coup et défier les défenseurs du bon goût. Cest sur les pages du quotidien tunisien Assarih quelle a publié sa réponse sous la forme dun article, paru samedi 27 février et signé Samir El Wefi. «Abderrazek ne prête pas dattention à ça. Il dit que ce ne sont que des futilités qui ne lui rajoutent rien et qui ninfluent pas sur sa concentration sur son travail ( ) parce que ça na rien de sérieux» réagit «Rzouga», comme se plaisent à le surnommer certains facebookeurs.
Le rédacteur de l’article, Samir El Wefi, également animateur démissions sur Hannibal TV, sest investi dans la défense de son collègue. Lobjectivité du journaliste est donc nécessairement au dessus de tout soupçon. «Lintérêt accordé par ce grand nombre de gens prouve la réussite réalisée par Abderrazek ( ) avec sa personnalité émouvante, son style fin et son langage sympathisant avec les victimes de la réalité et des conditions» écrit El Wefi. La pertinence de la plume de Samir El Wefi rejoint lingéniosité des questions dAbderrazek Chebbi. Sacrée Dream Team chez Hannibal TV !
Jerry Springer tunisien ?
La bloggeuse Snawsi a réagi, elle aussi, pour défendre, dans un post daté du 4 mars, Abderrazek Chebbi. Mais plus par compassion que par conviction. «Le ridicule de cette émission ne fait pas le poids face aux scandales des autres» écrit la bloggeuse en citant comme premier exemple «Andi Mankollek». Avec ses 3 650 000 spectateurs au compteur, cette émission a justement encore plus de succès quEl Moussameh Karim. On notera au passage que «Andi Mankollek» est la seule version tunisienne certifiée par Endemol.
A court de créativité, on recycle. Mais si la démarche est écologique quand il sagit de déchets industriels, la télé poubelle, elle, na pas fini de polluer notre paysage médiatique. Or nos producteurs sont prêts à tout pour augmenter laudience. Voici une histoire vraie qui risque dêtre un modèle du futur cauchemar que serait la télé tunisienne.
Il était une fois en Amérique, un animateur nommé Jerry Springer. Lancée en 1991, son émission était censée se pencher sur la politique. De plus en plus complaisante avec un audimat de bas niveau, des sujets provocateurs se sont imposés dans lémission. Ladultère, la drogue, la prostitution, la violence et le racisme sont devenus les sujets au cur de lémission. Le Jerry Springer Show est lune des émissions aux plus grands taux daudience au monde.
Notre télé tombera-t-elle aussi bas ? Verra-t-on naitre durant les années à venir des Jerry Springer tunisiens ? Si la démarche reste la même, on risque de crouler sous les déchets télévisuels. Heureusement que largent, comme la télévision, na pas dodeur !
Thameur Mekki
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