«Tounes ya mesikna» a été fortement applaudi par le public. Emel Mathlouthi semble l’avoir enivré, mardi 20 juillet, au Festival International de Hammamet. Même si la jeune artiste opte pour la facilité, l’audience la réconforte dans son choix. Entre le marteau et l’enclume, pauvre Tunisie !
«Tounes ya mesikna» a été fortement applaudi par le public. Emel Mathlouthi semble lavoir enivré, mardi 20 juillet, au Festival International de Hammamet. Même si la jeune artiste opte pour la facilité, laudience la réconforte dans son choix. Entre le marteau et lenclume, pauvre Tunisie !
Après presque trois ans de résidence en France, ses prestations en Tunisie sont devenues rarissimes. Auparavant, Emel a sillonné les scènes underground tunisiennes. Mais sa notoriété ne dépassait pas, à lépoque, le cercle dune petite communauté estudiantine et les habitués des concerts de musique alternative.
En effet, la jeune chanteuse a gagné en popularité grâce au web, notamment le réseau social Facebook.
Environ 800 personnes sont prêtes à lévasion sonore. Après presque une minute de performance a capella, la section rythmique vient soutenir le chant dEmel. Les rythmes de la batterie amènent le groove. La touche arabesque est assurée par le bendir. Mais on ne comprend rien aux paroles. Après avoir interprété ce morceau, Emel Mathlouthi explique au public: «Cest une chanson kurde»!
La facilité applaudie par le public
Les paroles dEmel Mathlouthi dénoncent linjustice et prônent la liberté. Ils extériorisent les maux générés par lindividualisme et appellent à lunité. Le bémol? Les lyrics de ses morceaux voulus et considérés comme «engagés» tombent souvent dans la facilité. Les textes dEmel sonnent comme des slogans creux. La musique alternative tire sa pertinence voire sa légitimité de son originalité. Et donc, un produit de contre-culture ne saurait simposer et élargir le champ de son possible quen bouleversant les codes… y compris les codes verbaux.
Tout au long de son parcours, Emel Mathlouthi na pas choisi les sentiers battus pour la production et la diffusion de sa musique. Comparé à la musique tunisienne mainstream (courant dominant), le répertoire de la jeune Emel est assez exceptionnel. Le hic est que sa musique baigne dans un registre simpliste voire banal. Du déjà entendu.
Cahier de charge musical rempli !
suffit pas pour autant à faire dun artiste, un créateur confirmé. Et ce, même si le public adore. Pour linstant, Emel Mathlouthi ne fait que remplir le cahier de charge du succès populaire. Ce contrat de confiance conclu avec le public est constitué de trois clauses caractérisant sa musique : «engagée», «exceptionnelle», «porteuse didentité tunisienne».
Pour «engagée», il suffit dinsérer dans les lyrics quelques termes du genre «horreya» (liberté), «kife7» (lutte), «madhloumin» (opprimés). Et le tour est joué. Pour «exceptionnelle», il suffit de ne pas jouer de la musique arabe commerciale, et de ne pas parler damour au sens superficiel du terme. Et le tour est joué. Pour «porteuse didentité tunisienne», il suffit de chanter en dialecte tunisien. Intégrer un instrument comme le bendir par exemple, serait un plus. Le sommet est atteint quand Emel reprend des morceaux tels que «Ma Bin El Wedien» du défunt Ismail El Hattab. Quitte à ce que la ballade bédouine saccouple à la musique celtique pour finir par être une création bâtarde.
Les trois clauses sont respectées. Le contrat est conclu. Et le public est content. Lartiste tombe dans la facilité et laudience le réconforte dans son choix. Dans la quasi-absence dune alternative de qualité, les compliments trompent lartiste sur la qualité de sa musique. Faut-il tirer la sonnette dalarme et investir pour rééduquer loreille musicale du public ?
Thameur Mekki