«Pourquoi j’ai voulu me suicider ? Car j’ai vu dans la mort le repos de mes problème». Un de nos lecteurs à voulu nous livrer son témoignage. Mais quels sont les symptômes d’une dépression qui peut mener au suicide et quelles sont ses origines ?
«Pourquoi jai voulu me suicider ? Car jai vu dans la mort le repos de mes problème». Un de nos lecteurs à voulu nous livrer son témoignage. Mais quels sont les symptômes dune dépression qui peut mener au suicide et quelles sont ses origines ?
«Ils me font rigoler tous ces gens qui appellent les jeunes à ne pas se suicider car cest haram (interdit dans la religion musulmane, ndlr). Mais quand on stigmatise un suicidaire et on le classe parmi les tueurs en séries, là je nai plus envie de rire», nous répond Mehdi (le prénom a été changé), 30 ans. Il a contacté la rédaction de Tekiano pour nous livrer son témoignage. Un témoignage dautant plus important dans les circonstances actuelles. «Jai tenu à vous contacter car ça me concerne. Jai voulu à plusieurs fois mettre fin à ma vie il y a une dizaine dannée. Donc oui, je suis un ex suicidaire récidiviste».
«Pourquoi jai voulu me suicider ? Car jai vu dans la mort le repos. Jai été dépressif. Jai perdu tout espoir dans la vie. Je me rappelle quà lépoque, mes problèmes me paraissaient insurmontables et insupportables. Bien que jétais entouré par la famille et les amis, je me sentais horriblement seul dans ma bulle à problème. Ca peut paraître paradoxale, mais personne na vraiment détecté que jétais au bord du gouffre.
Et pourtant, les signes étaient bien là. Jai pris énormément de poids. Je dormais presque toute la journée. Jai perdu mon sens de lhumour et je misolais un peu plus chaque jour. Personne na compris que je passais par une très mauvaise période. Et pour cause, en Tunisie, on pense encore que la prise de poids et lenvie de dormir sont des signes de quelquun methanni (NDLR : serein, comblé de bonheur). Avec le temps, je sombrais encore plus dans la dépression, jusquà ce que jaie décidé de mettre un terme à ma souffrance en me donnant la mort».
Mais navez vous pas pensé à la cruauté de votre acte ?
«Je ne pensais pas. Un suicidaire ne pense pas. Il perd toute notion de logique et tous ses repères sinversent. Un dépressif en stade avancé ne voit plus dans lacte de suicide une souffrance corporelle. Il y voit plutôt un soulagement.
Jirais même à dire que le moyen avec lequel un dépressif se donne la mort exprime lampleur de sa souffrance intérieure. Quand on touche le fond, tout deviens morbide dans notre tête. Il faut que les Tunisiens comprennent quun suicidaire est un malade mental et non lincarnation du diable.
Je suis passé plusieurs fois par ce stade et je peux vous dire que si une personne venait me sortir la carte du suicide est interdit par lislam pour me dissuader, jaurais encore plus envie de me donner la mort. Pire encore, les périodes où je suis passé à lacte (qui ont été infructueuses, heureusement) je faisais mes 5 prières et jétais très porté sur la spiritualité. Et cest là toute la perversion de cette maladie.
Car si on sombre dans la dépression tout en étant religieux, on finit par croire que même le Bon Dieu ne fait rien pour nous sortir de cette souffrance. Noubliez pas que tout sinverse dans la tête dun dépressif et tout devient morbide. Et dans ce cas, lacte de suicide devient une sorte de rébellion».
Vous semblez aujourdhui épanoui et guéri de votre dépression.
«Jai suivi un cursus scientifique. Ca peut paraître bizarre, mais cest ça ce qui ma permis de me ressaisir. Je me rappelle quaprès une dernière tentative ratée, je me suis rappelé un cours de biologie où on a appris que la dépression est due à un dérèglement au niveau des sécrétions neuro-hormonales du système neurologique.
Cétait comme un coup de poing dans la figure. Car jai réussi à démasquer la source de tous mes problèmes et tout a pris sens dans ma tête. Ma nature de combattant a repris le dessus et je suis parti illico presto chez un psy pour suivre un traitement. Les médicaments mont aidé à calmer mon cerveau et à reprendre mon self control».
Selon vous, que faut-il faire pour arrêter ces actes de suicides ?
«Il faut arrêter de stigmatiser ces personnes, de les diaboliser. Un dépressif a besoin découte. De se sentir compris. De sentir quil a des amis et non des ennemis. Lassocier au diable avec le discours religieux, cest contribuer dune façon indirecte à augmenter leur nombre. Calmez-les, gagnez leur confiance, montrez-leur votre amour et lamour de leurs proches. Cest par la suite que vous pouvez parlez de la religion pour les apaiser».
Welid Naffati