En Tunisie, au moment où règne un flou et une manipulation sans précédents, au moment où nos concitoyens cherchent à comprendre et à se bâtir une culture politique longtemps délaissée au profit du championnat de football, les chaines de télévisions tunisiennes rendent parfois les choses encore plus difficiles à cause de leurs choix d’invités lors de débats boulitiques.
Depuis son retour du Canada en janvier 2011, certaines chaines de télévision ont fait de Tarak Mekki une espèce d’Eric Zemmour local. En effet, certains animateurs d’émissions «politique» n’hésitent pas à l’inviter aux débats télévisés pour analyser la situation du pays. Après une campagne de com massive surfant sur les réseaux sociaux, voici que le personnage est désormais invité à déblatérer sur Hannibal et Nessma TV.
Tarak Mekki, est une figure tunisienne connue par ses discours plus dôles qu’intéressants, enregistrés depuis Montréal et diffusés sur Youtube et Dailymotion, où il critique, sur un ton vulgaire, le régime Ben Ali et dénonce les malversions et la corruption du système. Toute cette haine envers Zaba & Co est née des préjudices qu’il dit avoir subis à cause du clan des Trabelsi, les gendres de Ben Ali.
Après des études «avortées» en droit (l’expression est de Wikipedia, et après tout le droit à l’avortement est garanti par la loi en Tunisie), notre Tarak Mekki national s’est lancé dans le monde des affaires et a même créé son usine de textile. Et en 2004, après avoir été approché par le clan des Trabelsi pour partager les bénéfices de ses affaires, il dit avoir préféré quitter la Tunisie pour le Canada et s’installe à Montréal. Il se voit refuser le statut de réfugié politique par deux fois, mais devient clandestin à partir de 2008.
Sketchs boulitiques
Et voilà que les «sketchs» de Tarak Mekki ont fini par faire de lui «un homme politique» qu’on invite aux émissions-débats. Et voici qu’on ose l’installer sur le même plateau que des poids lourds de la vie politique nationale, tels Abdelfattah Mourou. S’agirait-il de mettre dans le même sac les uns et les autres, dans l’objectif inavoué de déconsidérer et de décrédibiliser des adversaires politiques ? Comment interpréter, sinon, l’entretien d’une telle confusion ? Un résistant qui compte des décennies d’activisme politique peut-il être délibérément placé au même qu’un «clown politique» ? C’est pourtant ce que nous fourguent nos chaînes télé en guise d’émission «boulitique».
Mais décidément, Tarek Mekki dit aussi des choses sensées, des petites phrases qui font mouche. Ainsi, il a répondu fièrement, quand il a été interrogé sur l’affaire Rajhi, «Je vais renoncer à la politique et me consacrer à la vente des fruits secs» . C’est dire combien Tarek Mekki compte «désacraliser la fonction présidentielle».
Quant aux animateurs des émissions, alors qu’ils devraient camoufler la faiblesse de leurs compétences par la présence de personnalités crédibles et dotés d’un fort potentiel d’analyse, ils s’enfoncent dans les abysses de la médiocrité en invitant des «hommes politiques» virtuels.
Delà à ce qu’on élise un président de la République sur la base de son nombre de fans sur Facebook…
Hamza Bouallègue
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