Non. Le Tunisien ne craindra plus les concombres, fussent-ils porteur de Escherichia coli 0104. Les khyar el mostaqbel n’ont plus d’avenir. Les cornichons qui nous prennent pour des cons ont fini en conserve dans un lointain pays désertique. Mais pour éviter la contagion du cornichon, il faudra garder les mains propres.
Notre vénérable agence Tunis Afrique Presse l’a annoncé. Elle est sans équivoque. Relayant un communiqué du ministère de la Santé publique, une dépêche énonce : «Aucun cas suspect de contamination par la Bactérie tueuse E. coli n’a été détecté à ce jour en Tunisie». En d’autres termes, le concombre qui a frappé les Allemands jusqu’à les tuer, a jusqu’ici épargné les Tunisiens. C’est que nos concitoyens sont vaccinés.
Après des années passées à courber l’échine devant les «khyar elmostaqbel», soit les concombres (à moins que ce ne soit les cornichons) de l’avenir, nos compatriotes n’ont plus peur. Les faqouss (autre nom de ce noble légume dans notre arabe vernaculaire) ne sont plus agités discrètement sous le burnous. Les Tunisiens se permettent désormais de hurler, de tonitruer. Et désormais, depuis que le fameux concombre du pouvoir s’est révélé un tout petit cornichon, plus personne ne nous fera impunément avaler sa salade.
Flics sur le retour, nostalgiques d’une ère où nos compatriotes étaient réduits à l’état de légume. Douanier dédouanés d’office de toutes les taxations. Politiciens magouilleurs, affairistes patentés. Tout ce beau monde se retrouve sous le feu des critiques, appuyées et soutenues par le bombardement militant des tomates propulsées par le bras vengeur de la Révolution.
Non. Le Tunisien ne craindra plus les concombres, fussent-ils porteur de Escherichia coli 0104. Les cornichons qui nous prennent pour des cons ont fini en conserve dans un lointain pays désertique. Voilà pourquoi «la crise du concombre» nous a épargnés. Cela dit, il ne faut pas crier victoire trop tôt. Notre ministère, qui tient à la bonne santé de ses concitoyens, souligne que pour continuer à éviter la contagion du cornichon, il faudra garder les mains propres. «L’observance de la propreté générale et particulièrement l’hygiène des mains» est la première condition pour repousser les velléités contrerévolutionnaires du concombre masqué. Ceux qui veulent nous faire passer le sang versé de Kasserine, à Thala, de Sidi Bouzid à Tunis, pour du jus de tomate, seront terrorisés. Mais qu’on se le dise : les cornichons truands n’ont plus d’avenir, et finiront au mieux enfermés dans un bocal.
Lotfi Ben Cheikh
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