«Nous avons mis fin au système corrompu». Cette réplique a constitué la virgule redondante du speech du ministre de la culture lors de sa rencontre avec la presse jeudi dernier. Est-ce un lapsus? La corruption est-elle hors de son contrôle? Certains journalistes, artistes et professionnels du spectacle ne sont pas rassurés. L’impunité, perdure-elle?
Le Festival International de Carthage sera inauguré demain, mardi 05 juillet, représentant le coup d’envoi de la saison culturelle estivale. Le programme définitif a été annoncé à la presse, jeudi 30 juin, en marge d’une rencontre avec le ministre de la culture. M. Ezzeddine Beschaouch a étalé certains chiffres sur le budget des festivals et la gestion des finances. Le ministre a rappelé que le budget consacré au Festival International de Carthage a été de 4.954.987 dinars en 2009 et de 4.643.713 dinars en 2010.
Pour cette édition, le Festival International de Carthage a bénéficié d’un budget de 1.780.000 dinars. Il déclare : «Le budget de cette édition représente moins que la moitié des budgets consacrés aux deux dernières éditions. Mais nous avons pu avoir 82 spectacles alors qu’en 2010 et en 2009, il y avait moins que 40 spectacles par édition». Entre toutes les données avancées par le ministre lors de son discours, et à chaque fois qu’il avance un argument, il insiste : «Nous avons rompu avec le système corrompu». La réplique a constitué la virgule de son speech.
«Cette année, nous avons pu avoir 82 spectacles à Carthage avec un budget équivalent à celui qui a été consacré pour 2 concerts en 2009. Il s’agit du concert de Warda et de celui de Charles Aznavour». Effarant ! Mais s’agit-il d’un choix au détriment de la qualité. Le ministre de la culture nie ceci : «Nous sommes parvenus à le faire en intégrant dans nos programmes plus de produit tunisien. Mais ce n’est pas du remplissage. Ce sont des spectacles tunisiens de qualité» dixit M. Beschaouch. Il a attesté que 75% de la programmation des festivals est faite de produits culturels tunisiens. Les artistes étrangers participent à hauteur de 25% dans les manifestations artistiques estivales avec une forte présence arabe.
Le ministre continue son speech en relevant un point relatif à la sélection de spectacles étrangers après avoir encore une fois employé sa transition préférée : «Nous avons mis à un terme à la corruption». Il explique un des procédés de programmation des artistes étrangers : «Nous sommes également parvenu à programmer autant de spectacles avec un budget aussi limité en multipliant les coopérations avec d’autres pays à l’instar de l’Autriche, de l’Egypte ou encore les autorités locales de la Sicile».
«Nous avons consulté diverses personnes très expérimentées. Nous avons impliqué les syndicats et sollicités plusieurs consultants. C’est fini avec la corruption» insiste-t-il. Le terme «corruption» est tellement redondant dans la rencontre avec le ministre de la culture ayant duré une heure qu’elle frôle l’obsession. S’il y a eu autant de corruption et de malversations dans ce ministère pourquoi l’impunité perdure? Pourquoi les mêmes responsables restent en poste dans ce ministère? Pour l’instant, aucune procédure de poursuite judiciaire n’a été faite à notre connaissance. Du moins, rien n’a été rendu public. En effet, il semble que la transparence n’est pas le point fort du Ministère de la Culture. Et même si M. Beschaouch et sa dream team -dont la moyenne d’âge avoisine les 60 ans- ont «mis un terme à la corruption» comme il l’affirme, la clarté n’est pas de mise.
D’ailleurs, même le Syndicat Tunisien Libre des Producteurs et Organisateurs de Spectacles a «dénoncé avec fermeté», dans un communiqué rendu public vendredi 01 juillet, «les méthodes de travail qui n’ont toujours pas changé, et qui souffrent encore d’opacité» ainsi que «l’encouragement et le soutien de Producteurs et/ou Organisateurs n’ayant pas acquitté leurs obligations et autres formalités administratives».
Thameur Mekki
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