«Salutations des jeunes de la Révolution» ainsi s’intitule le concert prévu ce soir, mardi 05 juillet, à partir de 20h à El Karraka de la Goulette. La soirée est en guise d’ouverture de la 47ème édition du Festival International de Carthage. Le hic? Tous les artistes ne sont pas si révolutionnaires que les organisateurs du festival le pensent.
El Général, Badiaa Bouhrizi alias Neyssatou et Yasser Jeradi ont la crédibilité de mériter ce surnom. Auteur, compositeur et interprète, Badiaa a toujours accompagné par sa voix suave les soulèvements populaires acharnés contre la corruption et le despotisme. Son morceau, «El Hafnewi El Maghzewi», rendait déjà hommage à un des martyrs de la Révolte du Bassin Minier du printemps de 2008. Les citoyens tunisiens aux yeux rivés jours et nuits sur les pages des réseaux sociaux depuis décembre 2010 et jusqu’à la fin du mois de janvier doivent se rappeler de sa ballade «Labess». Ce morceau fut un cri de détresse, une ode à la résistance fasse à la répression et à la brutalité policière. D’ailleurs, son répertoire regorge de morceaux contestataires baignant dans un univers de musique roots à l’instar de «Bledi», «Manifesto» ou encore «Kama kala Abi».
Quant à El Général, aussi débutant qu’il soit, le rappeur issu de la ville de Sfax, a craché sa rage dès l’un de ses premiers morceaux. Il a dénoncé l’injustice sociale, le despotisme et la corruption dans son morceau «Rayes Lebled». D’ailleurs, son propos contestataire a fait couler l’encre de la presse tunisienne et internationale jusqu’à figurer dans la fameuse liste des 100 personnalités de l’année du Time Magazine.
De son côté, Yasser Jeradi, fondateur du groupe Dima Dima, a souvent chanté la cause des marginalisés, des laissés pour compte. C’est le cas de sa ballade intitulée également «Dima Dima», reprise de l’Estaca, morceau de Lluis Llach connu pour avoir été l’officieux hymne de la résistance catalane face à la dictature de Franco. La société de la consommation, le capitalisme sauvage ou encore l’injustice sociale, autant de sujets qui ont laissé couler l’encre de Yasser, non seulement chanteur mais également auteur et compositeur de chansons caressant les registres de musiques caribéennes et latines. Rappelons-nous de sa ballade satirique, «Dheban».
La soirée sera également marquée par la participation d’artistes qui se sont habitués à bien ranger leurs langues dans leur poche. Le groupe de rap Crack, les Garbiz adeptes de pop rock à la sauce tunisienne ou encore l’hilarant Hatem Karoui et son Slam Alikom seront sur scène. Cependant, Dj Danjer et l’humoriste Wassim Herissi mettront du punch dans la soirée, des artistes confirmés dont le talent a été antérieurement instrumentalisé par l’ancien régime dans les campagnes électorales de Ben Ali et autres célébrations de son parti. D’ailleurs, le guitariste et chanteur Sofien Safta, un des chouchous du système benaliste, sera aussi sur scène pour «célébrer la révolution».
Du côté du Ministère de la Culture, il semble que le vieux carnet d’adresse ne sera pas jeté de sitôt. Et les anciens réseaux d’influence n’ont pas perdu de leur pouvoir. Même pour fêter la Révolution, les cicatrices mauves seront là à tâcher la scène.
Thameur Mekki
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