«Chanter devant un public qui ne me connait pas et qui ne comprend pas mes paroles n’était pas évident. C’était comme un examen pour moi» déclare Badiaa Bouhrizi après son show-case à Bari en Italie. La jeune auteure, compositeur et interprète semble avoir réussi son «examen». Tekiano y était.
Après le succès de sa participation au morceau “Enti Essout” et de sa performance lors du concert “L’Afrique fête la Démocratie” tenu le 11 novembre dernier, le premier album solo de Badiaa Bouhrizi est de plus en plus attendu. «J’ai fini les enregistrements. Il ne me reste plus que la post-production : le mixage, le mastering…etc» nous confie l’artiste. Et en attendant, elle multiplie les escapades scéniques. Il y a tout juste une semaine que Badiaa a donné un show-case à la ville de Bari en Italie dans le cadre du Medimex, salon dédié aux professionnels de la musique dans la Méditerranée. Sa participation à cet événement a été facilité par Tunisie Cultures, association fraîchement créé par un collectif d’opérateurs culturels tunisiens. Hisham Ben Khamsa, vice-président de cet organisme, nous en parle : «Les organisateurs du Medimex voulaient inviter un artiste tunisien pour donner un show case et participer à un colloque international portant sur le thème “Musique et Révolution”. Nous trouvons que Badiaa Bouhrizi est une artiste emblématique dans ce sens, poursuit-il, Elle est représentative d’une vague de jeunes artistes dont la musique a rythmé la Révolution. En plus, Badiaa a un potentiel qui lui permet d’évoluer, de sortir de l’underground et de trouver de la place dans les circuits internationaux de l’industrie de la musique».
Il est 10h45 à la salle 6 du complexe Showville à Bari. Madou Mc s’installe derrière son laptop. Quelques résonnances electro s’empare d’une salle investie par environ une centaine de pros de l’industrie du spectacle. Guitare en main, Badiaa Bouhrizi fait son entrée sur scène. Accompagnée par Wissem Ziadi au violon, les premiers accords viennent exiger le silence du laptop et appeler le violon à faire son entrée en douceur. C’est “Assr”, la ballade où Badiaa interpelle l’auditeur sur le sens de l’isolement et le réflexe que ça tue en chacun d’entre-nous. Elle revendique ainsi, dès le premier morceau du show-case son identité d’une auteure aux paroles contestataires, d’une artiste minimaliste favorisant la vibration des sonorités pures sur la complexité des compos organiques. Ensuite, elle enchaîne avec “Labess”, morceau cumulant cri de détresse et appel aux armes sorti en décembre 2010 alors que les révoltés faisaient face aux balles assassines du tyran. Elle l’a interprété en featuring avec son frère cadet, le rappeur Madou Mc. “Il apporte à mon répertoire une touche urbaine. Son rap donne un aspect plus vif à ma musique” déclare Badiaa Bouhrizi.
Ensuite, place à la mélodicité dans “Nadi al Hifa”. Dans ce remake de la chanson traditionnelle du Kef, le violon abandonne sa timidité. Wissem Ziadi y livre une performance dont la succulente mélodicité permet aux accords rythmiques de la guitare d’entraîner du groove, sans avoir besoin de basses ni de percussions. Badiaa explique ses choix : “Pour le show case de Bari, il était prévu que le percussionniste allemand David Kuckhermann m’accompagne. Notre concert donné récemment en Egypte était très réussi. Malheureusement, David n’a finalement pas pu nous accompagner en Italie. Et j’ai fini par décider de voir ce que ça donnerait un duo avec Wissem Ziadi au violon”. “Ila Salma”, “Kama Kala Abi” en version electro, “Salam” en featuring Madou Mc et “Haoum Guelou Blues”, les morceaux se succèdent. Pour l’occasion, Badiaa Bouhrizi a même chanté une ballade turque dont la mélodie est bien connue chez-nous sous forme d’un hymne satirique chanté au stade à chaque finale de la Coupe de Tunisie. De quoi donner une dimension méditerranéenne à sa prestation. Et les réactions étaient positives : «Après le show case, plusieurs d’opérateurs culturels internationaux sont venus se renseigner sur Badiaa au stand tunisien. Ils voulaient la programmer. Il y a eu aussi des représentants de certains labels indépendants internationaux qui voulaient prendre contact avec elle»
Après la sortie récente de «Just have to grow», premier album de Awalé, formation londonienne à laquelle appartient Badiaa Bouhrizi, la jeune tunisienne se penche sur la post-prod de son premier album solo tunisois. Tiendra-t-il ses promesses universelles ?
Thameur Mekki
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