La venue du prédicateur égyptien Wajdi Ghanim, invité en Tunisie par quelques associations islamiques, a suscité une grande controverse. Défenseur de l’excision et figure connue de la mouvance wahhabite, les réactions hostiles à sa visite ont fusé de tous bords. La blogosphère en regorge.
Voulant apaiser les ardeurs éveillées par sa visite, le prédicateur égyptien Wajdi Ghanim a déclaré sur les ondes de Shems Fm qu’il n’a jamais prétendu dire que l’excision est une obligation en Islam tout en précisant qu’il ne s’agit que d’une «opération esthétique». Loin d’apaiser la polémique, il l’enfle encore plus.
En plus des vives réactions sur Facebook et Twitter, quelques blogueurs ont fait part de leur opposition à la venue de ce prédicateur. C’est le cas de Jolanare. Dans un billet intitulé «La Tunisie et la dictature de l’impossible jouissance», elle écrit : «Que cette personne soit reçue avec les honneurs, dans un pays démocratique et libre, dans un pays qui a été le premier dans le monde arabe à accorder les droits aux femmes, et ce avec la complicité du gouvernement, je pense qu’il s’agit là d’une ligne rouge que l’on vient de franchir».
De son côté, le blog de Boukornine a publié, dimanche 12 février, un article intitulé «L’excision des fillettes, cette douce pratique» portant sur le même sujet. Il y appelle «la ministre de la Femme, le ministre de la santé, les organisations de défense des droits de l’Homme, l’ensemble de la classe politique et tous ceux qui ne cautionnent pas cette mutilation, qui n’a d’ailleurs jamais existé en Tunisie, à condamner la venue de ce prêcheur au discours moyenâgeux et aux prêches inhumains».
Le blog «L’Exception Tunisienne» a réagi avec trois posts. «Wajdi Ghanim, un salafiste de la pire espèce, ne peut que réconforter les esprits perclus dans leur ignorance. Tout ce dont il serait capable c’est de verser de l’huile sur le feu et de semer le trouble dans les esprits. Son discours ne peut qu’alimenter la « fitna » dans un pays qui a déjà assez de problèmes» écrit-il, dimanche 12 février.
Du côté de la classe politique, le parti Ettakatol a condamné la visite de Wajdi Ghanim, par le biais de son porte-parole Mohamed Bennour. Intervenu sur Mosaïque fm lundi 13 février, Bennour a exprimé l’indignation de son parti suite à la visite de Ghanim. Quant à la société civile, certaines associations ont fait part de leur inquiétude et leur colère suite à la venue du prêcheur égyptien. Le Mouvement Kolna Tounes fondée par Emna Mnif a rappelé, dans un communiqué, les différentes positions de Wajdi Ghanim et les a condamnés fermement ainsi que l’instrumentalisation des mosquées pour diffuser de tels messages.
Interrogé sur la venue des prêcheurs comme Amr Khaled, Safwat Hejazy et Wajdi Ghanim en Tunisie, le Cheikh Othman Battikh, Mufti de la République, s’est exprimé sur le sujet lors d’une interview publiée, lundi 13 février, par le journal hebdomadaire tunisien «Al-Osbouî» : «…Inviter des prédicateurs aux connaissances solides, aux opinions pertinentes et ayant une influence positive sur les gens est une chose souhaitée. Mais il faut que nous évitions les porteurs de prédications bizarres afin qu’elles n’engendrent pas une fitna…» a-t-il déclaré.
Les associations hôtes de Wajdi Ghanim ont organisé des conférences du prédicateur dans des mosquées tunisiennes. Le Ministère des Affaires Religieuses cautionne-t-il ce genre de discours et ces idées? Que ce soit consentant ou pas, par sa passivité, il fait preuve d’une mauvaise gouvernance digne d’une profonde réflexion et de fermes décisions.
Sarah Ben Hamadi
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