La photo publiée à la Une du quotidien arabophone Attounissia, mercredi 15 février, a conduit le directeur du journal derrière les barreaux de la prison civile de Mornaguia. Le jour même de sa publication du numéro en question, l’information était sous les verrous chez ce quotidien. Blackout !
La photo publiée à la Une du quotidien arabophone Attounissia, mercredi 15 février, a conduit le directeur du journal derrière les barreaux de la prison civile de Mornaguia. Le jour même de sa publication du numéro en question, l’information était sous les verrous chez ce quotidien. Blackout !
Notre couverture de cette affaire, ou plutôt notre tentative de la couvrir, révèle une autre facette de l’exercice journalistique dans notre pays : Comment les médias communiquent? Comment le personnel d’Attounissia a réagi suite aux arrestations ? Comment un média peut envoyer un journaliste se balader ? Plongée dans le quotidien d’un journaliste. Immersion dans un labyrinthe à la recherche d’une simple information sous les verrous d’un blackout médiatique exercé par un média.
Labyrinthe nommé Attounissia
Il est 11h, mercredi matin. Une information circule dans les couloirs du Palais de la Justice de Tunis. L’écho nous arrive : le ministère public a ordonné une enquête suite à la publication d’une photo considérée choquante à la une d’Attounissia. La possibilité de suspendre l’activité du journal, et donc son impression, est évoquée. Pour vérifier l’info, nous commençons par contacter, par téléphone, l’imprimerie «Dar Attounissia». «Nous n’avons aucune info là-dessus. Tout se passe normalement ici» répond-t-on avec concision avant de raccrocher.
Exit l’imprimerie. C’est le 7 bis, rue Docteur Alphonse Laveran – Tunis, siège du journal «Attounissia», qu’il faut appeler. Il est presque midi. «Nous ne savons rien sur le sujet. Le Directeur Général n’est pas là, le Rédacteur en Chef non plus. Nous n’avons pas d’infos sur le sujet. Rappelez plus tard» nous répond la standardiste. 45 minutes plus tard, rappel. Les deux hommes à la tête du quotidien ne sont pas au siège. «Puis-je parler à un autre responsable, s’il vous plait? Le secrétaire de rédaction par exemple?» demandons-nous.
Arrivée à l’impasse
Nous contactons le rédacteur en chef sur sa ligne mobile. Ça sonne, sans décrocher. Rappel 30 minutes après au siège du journal, pas de réponse. Rappel 1h, 2h après, toujours pas réponse. Nous finissions par admettre que la ligne téléphonique du 7 bis, rue Docteur Alphonse Laveran – Tunis, siège du journal «Attounissia», est une impasse. Evidemment, le directeur n’a pas rappelé à son retour comme nous l’avait promis la standardiste. C’est normal, le directeur n’est pas revenu.
Changement d’orientation. C’est sur la ligne perso d’un des journalistes de ce quotidien qu’il faudrait appeler. «La police est là depuis ce matin. Ils ont quitté vers 14h. Ils sont venus assurer la sécurité parce qu’on a reçu plusieurs appels menaçants. Ils sont aussi venus en savoir plus sur l’objet de ces appels» nous informe Aymen Rabâi, journaliste chez Attounissia. A 16h, la nouvelle concernant le lancement d’une enquête sous ordre du ministère public est annoncée sur Mosaique Fm par son collaborateur Mongi Khadhraoui lors d’une correspondance du tribunal. Finalement, il est nettement plus facile d’avoir l’info chez un l’appareil judiciaire, connu par son mutisme plutôt que chez le journal concerné.
Résultat des courses : chers Tunisiens, si vous voulez confirmer une information en cas de crise, ne comptez pas trop sur les médias, moins sur les patrons de presse, surtout pas sur «Attounissia».
Thameur Mekki