Islamologue, politologue, Professeur à l’université d’Oxford, Tariq Ramadan était à Tunis pour la promotion de son dernier ouvrage « L’islam et le réveil arabe ». Un week-end bien chargé, clôturé par une grande conférence au Palais des congrès à Tunis.
Islamologue, politologue, Professeur à l’université d’Oxford, Tariq Ramadan était à Tunis pour la promotion de son dernier ouvrage « L’islam et le réveil arabe ». Un week-end bien chargé, clôturé par une grande conférence au Palais des congrès à Tunis.
Samedi 25 février, à peine arrivé, Tariq Ramadan débute son marathon à la Villa Didon à Carthage. Une conférence de presse au cours de laquelle il ne manque pas de critiquer les débats actuels dans la société tunisienne en déclarant «Il faut cesser de se battre sur des positions bipolarisées. Il faut déplacer le centre de gravité. Les vrais problèmes sont les droits humains, l’économie, et la politique éducative» avant de demander « Qu’est-ce qu’un pays où l’élite reste à l’étranger?».
Interrogé sur la laïcité en Tunisie, Tariq Ramadan affirme qu’il n’y a aucun problème entre être musulman et laïc. Il en profite pour marquer son désaccord net avec les salafistes : «Les salafistes interprètent l’islam par opposition. Un islam assiégé. Mais l’Islam n’est pas : tu écoutes et tu répètes. L’Islam est : tu écoutes et tu questionnes.».
Changement de décor. Dimanche 26 février, après une table ronde à Beit El Hikma et une séance de dédicace à librairie Al Kitab à La Marsa, c’est au Palais des congrès que plus de mille personnes sont venues écouter Tariq Ramadan. Prévu à 15h, il arrive à 16h20. Brèves excuses acceptées et Mohamed Talbi entame sa présentation de l’ouvrage et son écrivain. Dans le public, quelques-uns crient «On veut Tariq Ramadan!» d’autres « Hors sujet !». Talbi rétorque : «Si vous voulez avorter cette conférence, continuez à m’interrompre ». Il poursuit sa présentation et parle d’une des thèses soutenues par Tariq Ramadan au lieu de présenter le livre sujet de la conférence. Au passage, il traite Ramadan de salafiste et wahbite. Sur le grand écran, on voit le visage surpris de Tariq Ramadan face aux propos de Talbi. Dans la salle, on commence à se demander si ce dernier a bien lu les ouvrages de Ramadan.
17h passé, Tariq Ramadan commence enfin sa conférence avec les deux termes qu’il n’aime pas utiliser : «révolution» et «printemps arabe». «Ce qu’on nous présente comme effet domino, je le considère comme un jeu d’échec qu’il faut regarder pays par pays, pourquoi on avance ici et on se retient là.» Et pour éviter d’être mal compris, il rajoute «Le courage du peuple tunisien, égyptien, syrien, etc. sont des choses indiscutables. Mais la reconnaissance du courage du peuple doit s’accompagner d’une lecture des faits.» Il appelle en ce sens à une lucidité politique et économique par rapport aux enjeux qui subsistent dans la région et les intérêts géostratégiques des pays étrangers. «Votre démocratie n’est intéressante que si elle rapporte. On se moque de la dictature si la dictature rapporte. On se moque de l’islamisme si l’islamisme rapporte !» assure-t-il.
Enfin, et à maintes reprises, Tariq Ramadan met l’accent sur l’éducation et l’importance d’avoir un esprit critique. Il insiste à lire pour s’ouvrir sur toutes les cultures et ne pas s’enfermer sur des interprétations littérales des choses, en affirmant « Le coran est une lumière sur le monde, mais il faut lire le monde !».
Sarah Ben Hamadi