Le débat a été décisif et les petites phrases ont fusé. L’affrontement François Hollande vs Nicolas Sarkozy pour le second tour a été scruté à la loupe, par les français mais aussi les Tunisiens qui ont commenté sur les réseaux sociaux.
«Je ne comprends pas cet intérêt exagéré porté par les Tunisiens aux élections en France ? Est-ce un réflexe de colonisés ou une projection par rapport à ce qu’on aimerait vivre chez nous ?» déclare une internaute tunisienne sur Facebook. «C’est le syndrome de Stockholm» déclare un autre en s’exclamant. Outre-méditerranée, le débat a suscité bien des commentaires. Avant la révolution, beaucoup de Tunisiens s’intéressaient à la politique française pour la proximité du pays et par défaut, face à une dictature qui ne permettait pas la politisation ni le débat. Aujourd’hui, les élections françaises permettent aussi d’échapper un peu à la frénésie politique en Tunisie. Mais bien plus encore, le débat a aussi été le moyen de scruter les dérapages éventuels des candidats quand la question de la xénophobie est aujourd’hui devenue le fer de lance de certains. François Hollande l’a évoqué, le «maghrébin» semble aujourd’hui ciblé par la politique de Sarkozy et sa dérive vers l’extrême droite, un fait qui ne peut qu’intéresser les concernés. Sur Facebook, les commentaires démontrent la présence d’une élite tunisienne encore très ancrée dans la francophonie pour qui la politique française reste une référence dans ses qualités comme dans ses défauts. Beaucoup voient encore dans la France, l’exemple (pas forcément à suivre) d’une démocratie. La plupart des tenants de la gauche tunisienne commentent ainsi allègrement l’art oratoire de François Hollande. «Avec l’ère de la com’ avant tout en politique, j’ai peur qu’on ait créé avec Sarkozy un redoutable spécimen. Sorte de bête de débat formé dans un conservatoire. Faut reconnaître qu’il est bon le bougre…La gauche n’est jamais dans son élément au jeu de la palme du salaud oratoire. »
Pour une autre internaute, le débat est une idée de ce que pourrait devenir un vrai débat démocratique en Tunisie «Quand je vois la qualité du débat Hollande/Sarkozy (enfin exception faite des insultes de Sarko, son incapacité à gérer les attaques) j’ai hâte de voir les mêmes échanges chez nous sur des projets politiques de fond !! » , « Ils ont eu leur bastille il y a plus de 200 ans, cela fait à peine un an que nous mettons les pieds à terre alors patience.» réplique un autre.
Plus que les talents d’orateur des candidats ce qui séduit, les internautes, c’est aussi la comparaison avec la politique tunisienne qui va jusqu’aux fautes de goût comme le souligne avec humour une jeune fille sur Facebook « Hollande part gagnant, plus que la maîtrise du discours politique, y a l’effet “lunettes” et ça, il le doit certainement à Marzouki….lol ».
Pourtant ces commentateurs sur le Facebook tunisien semblent oublier que la Tunisie a aussi son lot de politiciens qui savent rivaliser de piques et de moqueries mais aussi encourager le débat démocratique. Qui peut revendiquer la diversité d’une assemblée où un Brahim Kassas, chauffeur de Taxi, interpelle les «hypocrites» de l’Assemblée, où une Karima Souid s’indigne, tandis qu’Habib Kheder tranche froidement, que Néjib Chebbi envoie des vannes et que Maya Jeribi s’insurge avec fierté ? Les Tunisiens ont leurs orateurs, peut-être ne manque-t-il que le bon support et les bons modérateurs pour un vrai débat sur les vraies questions. A quand la confrontation Kassas/Zaouia sur le chômage ? A quand le clash Ayadi/Abou ou l’affrontement Fadel Moussa/Habib Kheder ?
Yasmine
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