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Tunisie : Liberté de presse en danger puisque pour Ennahdha, «tout peut changer»

A l’Assemblée Constituante, le vote a été serrée, 10 contre 11 pour l’article 26 sur la liberté d’expression. Les députés en faveur de moins de restrictions ont eu gain de cause. Mais les élus d’Ennahdha rappellent que «tout peut changer», une fois cet article soumis au Conseil Général.

 

A l’Assemblée Constituante, le vote a été serrée, 10 contre 11 pour l’article 26 sur la liberté d’expression. Les députés en faveur de moins de restrictions ont eu gain de cause. Mais les élus d’Ennahdha rappellent que «tout peut changer», une fois cet article soumis au Conseil Général.

anc-010812«Nous voulions restreindre cette liberté quand il s’agit d’une atteinte aux bonnes mœurs et à l’ordre public. Ce n’est pas du tout négatif, il y a ce genre de restrictions dans beaucoup d’autres pays» déclare Ahmed Smayiî, député nahdhaoui rapporteur de la Commission des Droits et des Libertés. Cet élu a en fait défendu son opinion lors de la séance tenue vendredi 27 juillet. Après un bras de fer qui a duré quatre jours, les députés se sont finalement mis d’accord sur un article global qui définit la liberté de création et d’expression comme suit l’extrait traduit par Salma Baccar, élue du Pôle Démocratique Moderniste :

«La liberté de penser, d’opinion et d’expression est garantie. La liberté de presse est garantie et ne peut être restreinte que par la loi qui protège la liberté d’autrui, sa santé, sa sécurité ou en cas de diffamation. Aucune censure préalable ne peut être exercée sur un journaliste ou un artiste. L’Etat doit protéger le droit à la culture et encourager toute forme de création artistique afin d’encourager une culture nationale ouverte sur les cultures du monde. L’Etat protège la propriété intellectuelle»

La bataille a été rude au sein de la commission où deux visions de société s’opposent. Pour Ahmed Smayiî, il s’agit «d’atteinte à une certaine culture, une tradition qui définit le peuple tunisien». Il a voulu mettre ces limitations, afin de ne pas laisser le champ ouvert à d’autres «restrictions», selon ses dires. «Pour moi, la notion d’atteinte à l’ordre public peut être instrumentalisée sous une dictature mais dans une démocratie, le juge saura interpréter correctement la loi. Pour la notion de bonnes mœurs, il faudrait peut-être remplacer le terme par «moralité publique» pour qu’il soit mieux compris» déclare le député pour qui le débat continuera en séance plénière.

L’article 26 n’est qu’une victoire en demi-teinte pour la liberté d’expression. Si l’article a été voté, son inscription dans la version finale de la constitution n’est pas garantie. Comme le raconte Selma Mabrouk, député d’Ettakatol, les présidents des commissions ont proposé de ne tenir compte en séance plénière, que des articles ayant reçu la majorité des votes. Si cette proposition est maintenue, l’article 26 risque d’entrer en contradiction avec l’article 3, dont la version ayant obtenu le plus de voix est celle qui criminalise l’atteinte au sacré: «L’état protège la liberté de croyance et de culte. Toute atteinte au sacré est un crime» Pour la députée Salma Baccar, une chose est sûre, la bataille continue : « il faut rester sur l’idée de présenter toutes les propositions à égalité, surtout celle où ne nous sommes pas parvenus à un consensus sinon nous allons droit dans le mur».

Pour Farida Labidi, députée nahdhaouie et présidente de la commission, «la décision finale reviendra au Conseil Général. Et donc, tout peut encore changer».

Lilia Blaise

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