Né d’un père policier et d’une mère institutrice, Oussema Mellouli a eu «une enfance simple et modeste» à la Marsa, ville côtière de la banlieue nord de Tunis. Issu d’une famille très soudée, Oussema Mellouli ne manque jamais une occasion pour rendre hommage à ses parents «ils m’ont inculqués les bonnes valeurs, m’ont appris à rester discipliné et égal à moi-même », et n’oublie pas ses deux frères et sa petite sœur qui «ont toujours été là dans les moments les plus difficiles». «J’avais la chance d’avoir deux grands frères qui ont toujours été un exemple pour moi» soutient-il. L’aîné est aujourd’hui chirurgien esthétique, le benjamin est professeur d’économie à l’université du Missouri aux Etats-Unis. Chez les Mellouli ? «les études ont toujours été une priorité», même quand on est champion olympique. En 2007, Oussema obtient son diplôme d’ingénieur en informatique à l’université de la Californie du Sud. Actuellement, il suit un master en Management du sport. «C’était très difficile de concilier études et carrière sportive de haut niveau, je passais beaucoup de temps en laboratoires, c’était très dur, mais Dieu merci, j’ai pu réussi les deux !» se félicite-t-il.
La natation, ce n’était pas vraiment un choix. A l’âge de trois ans, il était déjà dans la piscine de la Marsa avec ses frères. «Mes parents voulaient qu’on fasse tous du sport » raconte-t-il. Talentueux, le jeune Oussema commence à battre les records nationaux dans la catégorie des poussins. «J’ai eu la chance d’avoir un entraîneur qui croyait en moi dès le départ », dit-il en parlant du feu Mouldi Dahman. Il se souvient encore de son premier voyage avec l’équipe nationale «J’avais 13 ans et on partait pour un meeting international à Malte. J’étais très content d’avoir été sélectionné. Je voyageais pour la première fois !», se remémore-t-il en rigolant. «Au fur et à mesure des performances, je me suis dit que je suis peut-être doué, et progressivement mes ambitions ont grandi». A 15 ans, Oussema quitte la Tunisie pour la France, où il est inscrit au lycée climatique et sportif de Font-Romeu dans les Pyrénées-Orientales, pour faire sport-études. «C’était très dur pour moi, je n’étais pas dans mon environnement, mais je faisais des progrès colossaux, alors je suis resté deux ans ». L’année de sa terminale, il redescend du côté de la méditerranée, à Marseille, avant de partir aux Etats-Unis l’année suivante.
A 20 ans, il obtient son premier titre mondial, aux championnats du monde petit bassin à Indianapolis (2004). Commence alors une carrière impressionnante pour le nageur tunisien qui atteint la consécration avec la plus belle des médailles : l’or aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008. La première pour la Tunisie depuis 40 ans et la médaille de Mohamed Gammoudi à Mexico.
Devenu le symbole du sport en Tunisie, Oussema Mellouli a souvent été convoité par le pouvoir déchu, chose qu’on lui a beaucoup reproché après la chute de Ben Ali. «Quand on réussit des exploits sportifs au plus haut niveau, cela attire le circuit politique» justifie Oussema qui se défend d’avoir une quelconque relation «personnelle» avec l’ancien président. «C’est sûr que quelque part, il admirait ce que je faisais. Mais ma relation avec lui était celle d’un Chef d’Etat qui salue les performances d’un sportif.». Quant à sa fille avec qui on a prêté une relation, il avoue «ne l’avoir jamais rencontrée».
En 2012, Oussema Mellouli entre l’histoire du sport, en devenant le premier nageur à remporter des médailles d’or olympiques en piscine et en eau vive après sa victoire sur le 10km des Jeux de Londres. «C’est ma plus belle victoire, le meilleur moment de ma vie. J’étais sur un nuage ce jour-là». Après une année 2011 «très difficile » où Mellouli a souvent été l’objet de critiques, cette médaille était «une revanche » mais aussi son «cadeau à la nouvelle Tunisie». «Je voulais vraiment offrir quelque chose à cette nouvelle Tunisie» soutient-il. La révolution tunisienne, il l’a vécu de loin, aux Etats-Unis, «J’étais en même temps plein d’espoir et soucieux de ce qui pourrait arriver. Mais ce qui s’est passé le 14 janvier reste historique, d’ailleurs je garde encore le numéro du New York Times qui parle de cette journée! ». Pourtant aujourd’hui, il se dit être « déçu » de la situation actuelle du pays «on s’attendait à mieux de la part de ce gouvernement, mais j’espère que l’année 2013 sera meilleure».
Fréquemment accusé d’avoir «la grosse tête» notamment quand il dit que ce qu’il réussit à faire est un «exploit pour la Tunisie et le monde arabo-musulman», Oussema Mellouli le nie en souriant «mes propos ont mal été interprétés, j’ai toujours les pieds sur terre !». Avec une carrière aussi riche, il ne compte pas encore prendre sa retraite. «Ce sera pour 2016, après les jeux olympiques de Rio ». Oussema Mellouli, toujours plein d’ambitions, souhaite battre le record de l’athlète marocain Hichem El Guerouj et devenir le sportif arabe le plus médaillé.
S.B.H
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