Si les jeunes tunisiens refusent l’idée que le courant salafiste puisse participer à la vie politique, il n’en demeure pas moins que le tiers d’entre eux éprouvent une certaine sympathie avec la prédication salafiste (“La Dawa”) , révèle une étude menée par la sociologue, Boutheina Adib en collaboration avec l’observatoire national des jeunes.
Présentée lors d’un point de presse organisé mardi par le Centre de la Femme arabe pour la Formation et la Recherche (CAWTAR) à Tunis, cette étude qui a été menée en 2014 auprès d’un échantillon de 1700 jeunes âgés de 18 à 30 et issus de la région du Grand Tunis, a révélé que les femmes sont plus opposées à cette idée que les hommes.
Cette opposition est d’autant plus importante chez les jeunes ayant un niveau d’instruction élevé, souligne la même étude, précisant que 55% des personnes interrogées disent “ne pas être gênées par la tenue vestimentaire salafiste”.
Parmi les sondés, 36, 47% estiment que le comportement vestimentaire est “une forme d’engagement religieux” alors que 71.28 pensent que ca relève plutôt d’une “liberté individuelle”.
Selon la même source, 63% des jeunes interrogées se sont dits opposés au port du voile intégrale et du “Kamis” dans les établissements éducatifs.
L’étude nous apprend également que 63% des jeunes ne sont pas satisfaits du rôle joué par le mouvement salafiste au cours de la période de transition en Tunisie.
S’agissant de la montée du slafisme en Tunisie, 55.6% des jeunes ont estimé que le discours dans les mosquées figure parmi les principaux facteurs ayant contribué à la prolifération de ce phénomène alors que 27.2 % ont estimé que le chômage était la cause majeure.
Selon l’experte, cette étude quantitative menée dans le cadre d’un projet sur la participation civile des jeunes, “n’est pas exhaustive vu qu’elle ne comporte pas des analyses qualitatives du phénomène salafiste”.
De son côté, le chercheur et expert en sécurité globale, Nouredine Neyfer a indiqué que l’endoctrinement des femmes est “une question politique complexe”, estimant que 20% des volontaires engagés dans les rangs de Daech sont des femmes.
Il a fait savoir que la polarisation s’effectue à travers les réseaux sociaux, notamment, facebook et twitter pour les filles âgées de 16 à 30 ans, précisant qu’une fille sur quatre est recrutée de cette façon et que les plus ciblées sont les ingénieures en informatique et multimédias.
Il a ajouté que les organisations terroristes ont pu attirer les femmes tunisiennes par un discours religieux narratif et spirituel.
Pour lutter contre ce phénomène, Naifer a appelé à assécher les sources de financement des associations douteuses et ce en collaboration avec toutes les structures de l’Etat et à renforcer les projets de l’économie sociale et solidaire.
Il a, également, appelé à élaborer des stratégies éducatives dans les lycées et les facultés pour protéger les femmes et lutter contre leur polarisation, mettant l’accent sur la nécessité de changer le discours religieux adressé aux femmes.
Pour sa part, la présidente du centre d’échange de données et coordinatrice du programme de lutte contre la violence basée sur le genre au sein du CAWTAR, Hédia Belhaj Youssef a présenté les résultats d’une étude menée par le centre sur les travaux et recherches traitant du thème “Femmes et extrémisme” en Tunisie. Le rapport de l’étude souligne qu’il n’existe que très peu d’articles à ce sujet portant, notamment, sur Jihad Al Nikah ou sur des histoires de personnes victimes de terrorisme, citant un seul article de l’intellectuelle Amel Grami sur le salafisme au féminin.
Concernant les livres disponibles sur ce thème dans les librairies tunisiennes, Belhaj Youssef a indiqué que l’étude a recensé 70 ouvrages dont 41 sur le terrorisme alors que les autres traitent de l’islam politique, des révolutions arabes et des mouvements islamiques.