Le réalisateur Lotfi Achour propose un nouveau long-métrage tunisien « Demain dès l’aube » ou Ghodwa Hay. Le film avec en tête d’affiche Anissa Daoud, Doria Achour et le jeune Achref Ben Youssef a concouru dans la catégorie compétition officielle des JCC 2016.
Encore un autre film sur la révolution du 14 janvier 2011 dirait-on, mais cette fois-ci Lotfi Achour s’éloigne de la romance ou du lyrisme avec lesquels on a voulu peindre la révolte tunisienne, et lui donne un caractère à la fois cru et sensible à travers 3 personnages dont les destinées se croisent.
Une amitié improbable sous fond de révolution
Des scènes de vie entrecoupées de flashbacks, Demain dès l’aube se déroule entre les années 2011 et 2014 et se présente comme un thriller dramatique qui oscille entre l’étalage d’un récit intime et le suivi d’une enquête. Le lien qui unit les trois personnages principaux n’apparaitra qu’en milieu du film, quand on s’apercevra qu’ils ont partagé un vécu commun bouleversant au cours de la soirée du 14 janvier 2011.
Entre enquête et récit intime, le film raconte les destins croisés de Zaineb (Anissa Daoud), Alyssa (Doria Achour) et Houcine (Achraf Ben Youssef), une journaliste, une franco tunisienne et un adolescent issu des quartiers populaires, trois personnages rassemblés la nuit du 14 janvier et qui vont vivre ensemble la répression policière et l’anarchie qui a sévi cette nuit là.
Houcine va être directement confronté à des policiers qui l’ont malmené avant l’intervention de Zaineb et Alyssa, une intervention qui va changer le cours de leurs vie à jamais et même façonner leur avenir.
Un film pour ne pas oublier
Demain dès l’aube ne parle pas de la révolution tunisienne proprement dit. C’est l’exposé des conséquences d’une nuit qui commandent des milliers d’instants à venir. La révolte populaire baigne le film dans une ambiance morose imposée par la violence qui s’en est suivie.
C’est surtout l’impact de la révolution sur un échantillon de jeunes tunisiens qui est décrit à travers une histoire d’amitié inédite. Une recherche de l’autre qui est disparu et une quête de soi camouflée par un désir d’étaler les non-dits et un dévoilement des cruautés qui ont bel et bien existé.
Bande-annonce Demain dès l’aube:
Une Tunisie qui souffre 3 ans après
Ce n’est pas une Tunisie carte postale qui est vendue dans le film ‘Demain dès l’aube’, c’est plutôt la capitale moche et sale qui est mise en avant, les quartiers malfamés et les établissements insalubres qui y sont présentés. Dès la première scène du film, le lieu qui abrite des ateliers pour enfants sourds-muets est loin d’être idéal pour ces petits des quartiers populaires qui peignent leurs réalités et cauchemars.
La tourmente des deux personnages féminins de ‘Ghodwa Hay’ y est exacerbée. Elles sont déchirées par un quotidien où les interrogations et les doutes se multiplient mais unies dans leurs malheurs et dans leur envie d’avancer.
Lors de leur voyage direction la région de Sbeïtla, les divergences entre ces jeunes femmes de la capitale et leurs concitoyens de l’intérieur de Tunisie sont soulignées, les attentes ne sont pas les mêmes et les besoins sont complètement différents.
Zaineb et Alyssa reflètent une tranche de la jeune population tunisienne qui a tant espéré mais qui s’est trouvée au cœur d’une désillusion. Une frustration et mal-être qui accablent les personnages principaux après un espoir euphorique vite dérobé.
Le film ‘Demain dès l’aube’ rappelle que, certes des martyrs et des blessés sont tombés après les incidents de la révolution, mais les blessés de l’âme, les témoins de la cruauté sont beaucoup plus nombreux et leurs blessures demeurent vives et difficile à apaiser. Une désillusion post révolution du jasmin qui aura pourtant du mal à ébranler l’espoir et l’envie de se battre pour un demain meilleur, qui se veulent plus forts que jamais.
La sortie nationale du film «Demain dès l’aube » ou Ghodwa Hay de Lotfi Achour dans les salles de cinéma du grand Tunis est prévue pour mercredi 25 janvier 2017. En attendant des avant premières du film sont prévues dans les régions de Tunisie à l’instar de Sousse (18 janvier), Gabes (le 21 janvier) et le Kef (le 22 janvier).
Sara Tanit
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