C’est un grand coup de gueule que les acteurs et les protagonistes du secteur culturel tunisien lancent actuellement sur les réseaux sociaux et sur terrain. Et pour cause: les salles de cinéma en Tunisie ainsi que les salles de théâtre et tous les espaces culturels sont fermés depuis le 5 octobre 2020 par ordre du président du gouvernement, Hichem Mechichi, qui l’a décidé dans la soirée du samedi 3 courant.
La raison avancée: contrer la propagation du coronavirus en Tunisie…
La décision du ministère des Affaires culturelles tunisien était de s’aligner simplement sur la décision du chef du gouvernement et d’annuler par la même occasion une série de prestations théâtrales qui étaient prévues sous son égide à la Cité de la culture.
Le ministère n’a pas protesté ni montré aucun soutien aux agents du secteur culturel qui seront durement lésés par cette décision, estiment les concernés. Il n’a suggéré non plus aucune solution pour les aider à subvenir à leurs besoins.
Par contre, les cafés, les salons de thé, les mosquées, les restaurants, les centres commerciaux, les salles de sport, les bars, les marchés publics, les salles de fête et les différents autres établissements qui proposent des services divers demeurent ouverts! Les moyens de transport sont toujours aussi remplis. C’est à se demander si le coronavirus choisit les endroits où il désirent proliférer…
C’est dans cette ambiance qu’une manifestation pacifique, tout en respectant la distanciation sociale et le protocole sanitaire, a été organisée dans la matinée du lundi 5 octobre à la Cité de la culture de Tunis, dont voici une vidéo :
La veille, les réseaux sociaux ont été inondés par les photos et vidéos d’une manifestation d’un autre type, celle effectuée par les supporters du Club Africain, le soir, dans plusieurs villes de Tunisie pour fêter le centenaire du club.
Alors, le protocole sanitaire y a-t-il été respecté? On l’espère pour le bien de tous…
Les salles de spectacles et de loisirs sont celles qui s’appliquent à faire respecter le plus le protocole sanitaire en Tunisie. La distanciation entre les visiteurs, qui se font d’ailleurs de plus en plus rares, est de rigueur. Les masques sont imposés et les moyens de protection sont accessible à tous.
Tout le monde peut constater que ce n’est pas le cas dans la plupart des autres établissements destinés au grand public.
Voici une image désolante partagée du côté du Cinémadart à Carthage Dermech: le café juste en face est bondé alors que l’un des cinémas qui est connu pour être l’un des mieux entretenus en Tunisie, et dont les employés y imposent un ordre et une propreté exemplaire, depuis bien avant la crise de la covid-19, est fermé…
Le secteur culturel et les métiers du spectacle qu’on décide de sacrifier en Tunisie font vivre des milliers de familles. Pour la préparation des pièces de théâtre et/ou d’un spectacle, un travail de plusieurs mois est nécessaire afin de proposer un produit artistique de qualité.
Les espaces culturels sont un des premiers refuges pour les jeunes avides d’évasion et d’échappement de la routine morose. Outre leur objectif de divertissement, c’est là qu’on apprend et qu’on développe des talents et qu’on crée des vocations. Ce ne sont pas des lieux de consommation brute, c’est un investissement moral et intellectuel pour les temps futurs…
En France, la culture contribue sept fois plus au PIB que l’industrie automobile… Avec notre potentiel humain dont le talent et le rayonnement dépassent souvent les frontières du pays, ne pourrions-nous pas en faire un des piliers de l’économie en Tunisie au lieu de le marginaliser à ce point?
Sara Tanit