Le gouvernorat de Jendouba est la région la plus ‘verte’ de la Tunisie avec des forêts couvrant 40% de sa superficie totale, représentant à elles seules 10% du réservoir forestier du pays. Il est intéressant de mentionner une autre particularité de la région, ses forêts sont habitées, on rencontre cela rarement dans le monde, ailleurs qu’en Tunisie.
De ce fait, la survie et la pérennité de ces écosystèmes fragiles vont de pair avec le bien être de la population locale principalement logée au niveau de Tabarka et Ain Drahem. Nous avons eu l’opportunité de visiter des parcs de la régions et rencontrer des forestiers et des amoureux et habitants de la forêt dans le cadre d’une formation organisée par WWF Tunisie sur le rôle des médias dans la conservation de la biodiversité. Nous vous proposons de découvrir ces sentiers pas si perdus que ça.
Ain Baccouche, le parc à Cerfs de Barbarie
A quelques kilomètres de Tabarka, on trouve le parc Ain Baccouche, appelé aussi parc à Cerfs, il s’étend sur une superficie de 120 hectares. Crée dans les années 70, il constitue une des 4 réserves nationales pour la conservation de la faune sauvage. Cette réserve naturelle a été conçue pour protéger entres autres une espèce animale menacée; le cerf de Barbarie (Cervus elaphus barbarus), aussi appelé cerf de l’Atlas.
Le Cerfs de Barbarie est une des espèces en voie d’extinction. C’est un animal particulièrement protégée en Tunisie et en Algérie. Un programme a été mis en place au parc de Ain Baccouche pour faciliter sa reproduction. Partant d’un couple de cerfs protégés, les animaux se sont reproduits dans des enclos fermés, et on compte aujourd’hui 27 spécimens suivis qui gambadent en toute sérénité dans leur milieu naturel, nous informe Noureddine Azizi, chef de l’arrondissement des forêts à Tabarka.
Ce seul représentant des cerfs en Afrique et toujours menacé à cause de la chasse sauvage et l’invasion de braconniers. Les gardes forestiers de Tunisie ont peu ou pas de moyens pour protéger les animaux ou se protéger eux même et faire face à ces assassins. La menace provient aussi du grignotage et la détérioration de l’espace vital des Cerfs par les hommes, les changements climatiques, les incendies et aussi le manque de moyens dédiés à l’aménagement et la restauration du parc.
Parc Oued Zen, une réserve naturelle exceptionnelle
Sur les hauteurs des montages de Kroumir, du côté de Ain Drahem, se trouve une magnifique réserve naturelle, le parc Oued Zen situé dans la région la plus humide et la plus arrosée de Tunisie.
S’étendant sur une superficie de 6 700 hectares, il est constitué principalement de chênes-lièges et de chênes zéens à hauteur de 80%. C’est un parc bien connu par la communauté des campeurs et randonneurs qui viennent y séjourner de tous le pays.
On découvre dans ce parc plus de 70 plantes différentes, desquelles on extrait plusieurs variétés d’huiles essentielles de grande valeur, en plus de 25 espèces de mammifères et 70 d’oiseaux qui y cohabitent. Sans compter, 25 espèces d’amphibiens et des milliers d’insectes.
On y collecte des plantes médicinales et des champignons. Mais c’est aussi là ou on récolte le matériau ‘liège’ à partir de l’écorce des arbres. Presque 70 000 quintaux de liège sont produits par an à partir des chênes des montagnes de Ain Drahem, cela équivalut à 90% de la production nationale.
Ce parc exceptionnel est géré actuellement par l’Etat et souffre malheureusement de plusieurs manquements, il a pourtant un potentiel écotouristique inestimable et un bel espace pour développer une économie alternative.
Valorisation et importance de la sensibilisation pour préserver la biodiversité
les responsables de ses parcs formés dans l’Institut Sylvo-Pastoral de Tabarka, et qui travaillent sous l’égide de l’Etat et la direction des forêts sont unanimes, ils n’arriveront pas à protéger et sauvegarder la biodiversité et les richesses naturelles seuls. C’est un travail en amont qui doit être entrepris en plus de la multiplication des partenariats public-privé.
L’exploitation des forêts, source de revenus des milliers de familles qui y habitent est possible mais c’est important qu’elle soit éco responsable en formant la population aux bonnes techniques pour le ramassage de liège par exemple et en orientant le bétail pour se nourrir dans les endroits qui ne nuisent pas à la végétation. Plus d’encadrement est nécessaire aussi pour orienter les jeunes vers des formations valorisantes et les aider à promouvoir les produits issus de la terre.
Il est aussi primordial d’appliquer une sensibilisation auprès du grand public et, surtout, les enfants et jeunes. Leur expliquer l’importance de protéger les végétaux pour créer un environnement sain pour la vie de l’Homme, surtout en ces temps marqués par la sécheresse et la faiblesse du bilan hydrique ce qui créé un phénomène de dépérissement des arbres.
Par ailleurs, l’appel est aussi lancé pour faire face à la détérioration causée par l’homme. L’entrée des parcs et plusieurs de ses allés sont malheureusement jonchés de débris et déchets plastiques. Les visiteurs se doivent d’être responsables et ramasser leur déchets pour laisser les parcs aussi propres qu’ils les ont trouvé. A défaut d’être conscient, un système de sanction devrait être mis au point pour freiner les moins vigilants et créer en parallèle des revenus supplémentaires pour ses parcs, si consommer des produits de la place n’est pas possible.
Le développement de gîtes ruraux ou ecolodges qui ont une double vocation écologique et agricole est aussi une idée à prendre en considération. Ces derniers, plus grands que les maisons d’hôtes, peuvent abriter cette communauté de touristes qui désertent les hôtels traditionnels. Les visiteurs seront certainement curieux de connaitre les spécificités de la région grâce à des guides formés dans le domaine du tourisme alternatif.
Sara Tanit
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