Tunisie : Facebook et délires footballistiques

Des internautes tunisiens recommandent le service militaire à l’Equipe Nationale pour renforcer son patriotisme. D’autres facebookeurs vont encore plus loin…

Plus de 3000 Tunisiens recommandent au Ministre de la Jeunesse et du Sport, à travers un groupe facebook, d’expédier tous les joueurs de l’équipe nationale au service militaire pour une période d’un mois afin de renforcer leur sens du patriotisme.

C’est que notre continent africain en a vu d’autres, en matière de sanctions infligées à des footballeurs pour cause de mauvais résultats. En janvier 2000, la sélection nationale de la Côte-d’Ivoire a été mise aux arrêts militaires pour «indiscipline». En 1974, Mobutu, ex-président du Zaïre (actuellement République Démocratique du Congo), a conduit les footballeurs dans les geôles après les mauvais résultats du Zaïre à la Coupe du monde 1974. A l’époque, même le président guinéen, Ahmed Sékou Touré, l’a fait après les défaites de l’équipe du Hafia de Conakry (Guinée) en finale des Coupes africaines. Voilà qu’en 2009, des internautes tunisiens veulent remettre au goût du jour ces pratiques, en un rituel made in Africa pour dribbler le mauvais sort.

Les Arabes ne sont pas en reste. Oudaï, le fils du président iraquien déchu Saddam Hussein, était, à la fois, président de la Fédération irakienne de football et du Comité olympique irakien. La presse européenne, notamment le quotidien belge Le Soir et le quotidien français Le Monde, rapporte des témoignages de Habib Jafar, ex capitaine de l’équipe nationale iraquienne et d’Ammo Baba, ancien sélectionneur. «Quand Oudaï était mécontent d’un sportif, il le transférait dans un centre militaire. Le puni devait ramper dans la boue ou était obligé de courir devant une voiture des heures durant.» déclare Habib Jaafar au quotidien français «Le Monde». «Dans les tribunes, les hommes de main d’Oudaï recensaient les mauvaises passes. Les excès de gaucherie étaient passibles d’emprisonnement. Quand nous rentrions d’un match à l’étranger, une liste de noms était affichée dans le hall de l’aéroport. Les joueurs savaient que les «nominés» allaient directement en prison.» raconte Ammo Baba au quotidien belge «Le Soir».

Et visiblement, ces précédents arabo-africains ont inspiré des facebookeurs tunisiens. Ceux du groupe «Shame on National Footbal Team LA HONTE» parlent ainsi «d’envoyer les joueurs de l’Equipe National de Football avec tous les responsables et les entraineurs à la prison ou les mettre à la porte ou à la poubelle».

Parler de prison et de service militaire pour sanctionner des sportifs relève du fanatisme délirant de certains supporters tunisiens. Mais ce genre de réactions épidermiques, aussi extrémistes que ridicules, ne sont-elles pas la conséquence de la place excessive accordée au foot dans l’espace public ?


Thameur Mekki

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