Tunisie : Piratage, la solution de Ridha Behi

Ridha Behi, propose une solution qui permettrait de soutenir le cinéma tunisien sans éradiquer le piratage. Un rapide calcul démontre l’étendue des bénéfices que notre cinéma pourrait tirer de la gravure si sa solution était appliquée. Les pirates de Dvd sauveraient-ils notre cinéma ?

Bon nombre des boutiques de gravure de CD (si ce n’est la plupart d’entre elles) ne proposent pas de films tunisiens à leur clientèle. Et pour cause : la distribution de DVD pirate de long-métrages tunisiens est strictement interdite, pour ne pas léser la fragile «industrie» cinématographique du pays (en admettant qu’elle existe). Certains proposent quand même ce type de DVD sous le manteau à leurs plus fidèles clients. Courant ainsi le risque de sérieuses sanctions. Toutefois, l’écrasante majorité des boutiques de gravure de CD a fini simplement par abandonner les films tunisiens.

Les avis des professionnels du cinéma divergent sur la question. Un réalisateur comme Nouri Bouzid s’affirme clairement en faveur du piratage, y compris de ses œuvres, pour permettre à un maximum de cinéphiles de les apprécier. Un point de vue qui se défend d’autant plus que les salles obscures se font plutôt rares sur le territoire de la république. Le problème, c’est que cette position est difficile à tenir. Les Tunisiens ne se bousculent plus devant les guichets de cinéma, même pour un film réalisé par l’un de leurs compatriotes. Que le piratage des œuvres tunisiennes soit toléré risquerait de les achever.

Mais voilà qu’un des plus éminents membres de la confrérie des cinéastes tunisiens, Ridha Behi, en l’occurrence, propose une solution. Une solution pragmatique, facile à mettre en œuvre, et qui ne prétend pas éradiquer le piratage du paysage. Une solution qui permettrait aux Tunisiens de visionner confortablement les films réalisés par leurs compatriotes. Ce qui n’est pas toujours évident. Certains films tunisiens n’ont ainsi jamais eu les honneurs du grand écran. Le long-métrage «El Kotbia» (2002) de Nawfel Saheb-Ettabaâ a été tout simplement zappé par nos distributeurs. Pas assez commercial, selon eux. Un petit bijou, pourtant, et c’est la télé tunisienne qui a eu le mérite de le diffuser. Sans atteindre ces extrémités, les cas de ce type abondent. Sans parler des films des décennies précédentes, dont les bobines doivent prendre la poussière, (voire perdues) sans espérer pouvoir être exhumées un jour.

La solution préconisée par Ridha Behi est toute simple. Les graveurs qui voudraient proposer des films tunisiens à leurs clients devraient détenir un Dvd «original». Cette mesure a été défendue à plusieurs reprises par Ridha Behi sur le petit écran, notamment jeudi dernier, lors de sa dernière apparition dans l’émission «Wajhan li wajh» sur Tunisie 21. Ainsi, le ministère de la culture proposerait une copie «certifiée» pour une dizaine de dinars. Nos revendeurs seront libres d’en faire autant de copies qu’ils le désirent et pour le prix qu’ils souhaitent eux-mêmes fixer. Ridha Behi souligne «les 70 000 boutiques de gravure pourront ainsi participer au financement du 7ème art en Tunisie».

Les graveurs pourraient même être tenus de détenir, dans leur catalogue, un minimum de 5 films tunisiens par an. Un rapide calcul démontre l’étendue des bénéfices que notre cinéma pourrait tirer de la gravure et du «piratage» tant décrié. De quoi encourager le cinéma tunisien, sans léser le spectateur, ni les graveurs, d’ex-chômeurs diplômés pour la plupart d’entre eux. Delà à ce que nos pirates de Dvd, soient un jour considérés comme les sauveteurs de notre cinéma…

Oualid Chine

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