Yves Cusset pose un regard désenchanté et décapant, plein de drôlerie, sur la possibilité de l’engagement politique dans le monde actuel. Avec une mention spéciale pour la Révolution Tunisienne et les rêves fous qu’elle a suscités.
Ce vendredi 23 septembre, au Théâtre Municipal de Sousse, le philosophe-écrivain-acteur Yves Cusset montera sur les planches dès 19h pour nous parler de son “Manuel d’engagement politique à l’usage des mammifères doués de raison et autres hominidés un peu moins doués”. Il proposera le lendemain une conférence-débat sur le thème “Insurrection, démocratie et citoyenneté”.
Un spectacle humoristique sur le sens de l’engagement politique dans un monde sur lequel il semble que nous ayons perdu tout contrôle. Cette pièce nous fera suivre les tribulations d’un auteur sous influence, ayant décidé d’écrire un spectacle politique sur les conseils insistants d’un bon ami. C’est l’occasion pour Yves Cusset de poser un regard désenchanté et décapant, plein de drôlerie, sur la possibilité de l’engagement politique dans le monde actuel. Ce spécialiste de Foucault, Habermas et de la philosophie politique, nous livre avec beaucoup d’humour et une inénarrable présence scénique, sa vision folle et tendre, entremêlée d’extravagances philosophiques et de jeux de mots en cascades, de l’engagement politique dans le monde actuel.
Moins de trois ans après avoir joué «Rien ne sert d’exister», dans la même ville, et avoir subi quelques remontrances des anciennes autorités, «sur la légèreté de ses références à Dieu», il est heureux de se produire «dans la Tunisie désormais appelée post-révolutionnaire, où tout le monde ne désire plus qu’une chose : s’exprimer librement et parler politique, à tout moment et en tout lieu, de manière souvent anarchique, parfois excessive voire verbalement violente, mais on a redécouvert le goût de l’espace public, cet espace ouvert où, sans jamais se connaître personnellement, il est possible à des inconnus de se rencontrer et de se parler, avec passion, cette passion de la parole publique qui semble avoir délaissé en grande partie ces vieux pays européens qui ont pu un temps s’en réclamer ». Il vient donc « dans cette démocratie toute neuve parler de la difficulté à s’engager dans ces vieilles démocraties lasses de l’autre côté de la Méditerranée ».
En janvier dernier, cet enseignant en IUFM et à Sciences Po Paris, écrivait un billet, au fil d’un rêve sur le possible espace réellement politique que les évènements tunisiens auraient pu faire éclore. Voici un extrait (la totalité est disponible ici) : « Alors je me suis mis à rêver que le peuple qui disait non prenait lui-même le pouvoir, le seul véritable, celui qui vous rend maîtres de vous-mêmes, je me suis mis à rêver que s’organisaient partout des rassemblements, des manifestations, des discussions publiques, j’ai même été jusqu’à rêver que ce peuple imaginaire redonnait une petite envie de démocratie aux peuples fatigués des vieux pays démocratiques, qui arrêtaient de donner des leçons de liberté pour en recevoir à leur tour. Je rêvais que ce peuple ne se faisait pas voler sa révolution par les quarante voleurs qui entouraient autrefois Ben Ali Baba et sa duchesse partis précipitamment, je rêvais qu’aux quatre coins de ce pays on réapprenait la joie de désobéir, que la police et l’armée se trouvaient d’un coup renvoyées à l’évidence de leur inutilité sociale. Je rêvais bêtement que cette révolution inspirait les peuples voisins, redonnait l’espoir aux peuples opprimés, et plus encore je rêvais – ah douce naïveté du rêve ! – qu’elle faisait croire au monde entier qu’il y avait peut-être une autre politique possible que l’adaptation à l’incontournable réalité économique, telle du moins qu’elle est définie par ceux qui en ont le pouvoir, qu’elle parvenait à faire croire que la politique était tout simplement encore possible : une action et une parole communes pour décider ensemble des voies qu’on peut emprunter collectivement. »
Dommage que ce ne fût qu’un rêve !
Léna
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